Merci de votre compréhension - Elsa Delmas

« J’AVAIS JUSTE ENVIE DE VOUS DIRE : AIMEZ-MOI ». J’ai dit ça dans ma première pièce et j’ai eu l’impression de balancer une bombe. J’ai simplement exprimé ce que je souhaitais : qu’on m’aime. « AIMEZ-MOI » comme un ordre, une supplication. J’étais nue. Pas physiquement mais ça revenait au même. Il y a eu une gêne, un flottement. Je pressens que dans ce court instant est né le cœur de mon travail artistique.

Je suis Elsa Delmas. Je suis une actrice. J’ai besoin qu’on m’aime et qu’on me regarde. Je veux être le centre de l’attention. Chers spectateurs, que voulez-vous que j’y fasse ?

Pourquoi ai-je à ce point besoin d’être au centre de l’attention ? Jusqu’où suis-je accro à la reconnaissance ? Quelle est cette pulsion magnifique et absurde qui me pousse à vouloir briller sous les projecteurs ? Ces spectateurs qui m’écoutent poliment, m’aident-ils à avoir une meilleure estime de moi ?
Ok.
Il faut évacuer. Cette volonté cruciale de plaire est trop lourde à porter. Il est temps d’en finir. Je ne peux plus me contenter de ça. Je ne veux plus me contenter de MOI. Je ne veux plus être un cliché d’actrice. Ça suffit. Je vais renoncer à MOI. Et je vais le faire devant vous chers spectateurs. Merci de votre compréhension.

Mais alors, qu’est-ce qui m’intéresse en réalité ? Mettre en scène la posture de l’actrice Elsa Delmas ? Vraiment ? Détruire mon égo en public ? Sérieusement ? Faire ce premier geste insensé et grotesque.
OUI.

Et après, une fois affranchie de moi-même, qu’est-ce qui se passera ?